Pour 2025, nous nous attendons à ce que la reprise de l'activité mondiale des fusions-acquisitions pour le Private Equity, qui a commencé en fin d'année dernière dans le monde mais pas encore en France, se poursuive et s'accélère. Cette tendance est alimentée par les récentes baisses du coût du capital et deux facteurs spécifiques à l'industrie : l’accumulation croissante de “poudre sèche” et le nombre important de sociétés de portefeuille détenues depuis un certain nombre d’années par les fonds qui devraient chercher à revendre leurs participations. L'accent mis par la nouvelle administration américaine sur la déréglementation et les réductions d'impôts pourrait également stimuler les transactions au cours de l'année à venir.
Avec des valorisations restant élevées grâce à des marchés de capitaux dynamiques, en particulier aux États-Unis, et un ralentissement de la baisse des taux d’intérêt, la création de valeur restera au cœur des préoccupations des investisseurs. La polarisation entre les actifs justifiant une valorisation élevée de par leur trajectoire et leurs caractéristiques (résilience, croissance, transformation) et les actifs moins performants est de plus en plus marquée. De plus, de nombreuses grandes entreprises se concentrent sur leur cœur de métier et se séparent de pans de leurs activités annexes, qui sont parfois de taille importante, créant ainsi de nouvelles opportunités : les fonds continuent d’aimer les carve-out comme nous l’avons vu en France avec Opella.
Nous anticipons également que la consolidation se poursuive dans le secteur du Private Equity avec le rapprochement entre sociétés de gestion et la plateformisation multi-stratégie qui permet de répondre aux exigences croissantes des régulateurs et des investisseurs (conformité, ESG, reporting...).
Enfin, 2025 devrait voir une augmentation conséquente des sorties en fonds de continuation qui représentaient déjà une sortie sur six en 2024 (au niveau mondial) et la France n’échappera pas à cette tendance.
« En France, le secteur du Private Equity réussit à traverser les turbulences au prix d’une polarisation marquée entre les gérants et entre les actifs. »
Martin Naquet-Radiguet,Private Equity Leader France, Associé PwC France & MaghrebLa reprise des fusions-acquisitions dans le secteur du capital-investissement a commencé il y a plusieurs mois, marquant la fin d'une période de stagnation de deux ans. Dès le deuxième trimestre 2024, la valorisation des transactions de capital-investissement a recommencé à croître, bien que cette progression n'ait pas été régulière, connaissant un certain ralentissement plus tard dans l'année. Cette reprise initiale donne une impulsion au secteur et le positionne sur une trajectoire de renouveau pour 2025, malgré une certaine inquiétude du marché concernant les taux d'intérêt.
Cette croissance des transactions s’accompagne d’un contexte de plus en plus favorable pour l'émission d'actions, avec des volumes d'introduction en bourse (IPO) qui se normalisent et des perspectives solides pour 2025. Avec plus de 1 200 licornes (entreprises privées valorisées à plus d'un milliard de dollars) sur le marché et des sorties latentes de fonds de leurs sociétés de portefeuille, les opportunités pour le secteur du Private Equity semblent prometteuses pour l'année à venir. Le marché des IPOs aux États-Unis a poursuivi son retour progressif en 2024, levant 50 % de fonds supplémentaires par rapport à 2023 et près de quatre fois plus qu'en 2022. Bien que les tendances des introductions en bourse varient selon les régions, le marché reste une voie de sortie intéressante pour les sociétés de gestion cherchant à restituer du capital à leurs investisseurs.
L'accumulation de "poudre sèche" (réserve de capital disponible) est considérable. Selon Preqin, les fonds disponibles dans le monde pour les sociétés de gestion dans le secteur du capital-investissement (hors capital-risque) ont dépassé pour la première fois les 1 600 milliards de dollars en 2024, dont environ 1 000 milliards rien qu’aux États-Unis. En décembre 2024, le montant de la “poudre sèche” détenue par le Private Equity à l'échelle mondiale était 43 % plus élevée qu'à la fin de 2019, avant la pandémie.
En complément des investisseurs institutionnels traditionnels, l’industrie du Private Equity fait de plus en plus appel aux investisseurs particuliers et aux compagnies d'assurance comme sources importantes de capitaux.
Les sociétés de portefeuille ont un cycle de vie qui aboutit généralement sur une sortie du fonds de l’actif. Cependant, dans certains cas où les valorisations ne correspondent pas aux attentes ou les sorties prennent plus de temps que prévu, les fonds peuvent utiliser les fonds de continuation. Ces fonds prolongent la période de détention des sociétés de portefeuille par les sociétés de gestion sans avoir à vendre leur participation à un autre acteur, tout en offrant aux investisseurs (LPs) la possibilité de sortir leur investissement du fonds s’ils le souhaitent.
Les fonds de continuation sont devenus plus courants après la crise financière mondiale de 2008, les sociétés de gestion attendant que les valorisations augmentent. Avec l’environnement complexe de taux d'intérêt élevés des deux dernières années et l’augmentation du nombre de sociétés de portefeuille dont les font cherchent à se retirer, l’intérêt pour ces types de fonds s’est fortement amplifié : à la mi-2024, les fonds de continuation détenaient plus de 50 milliards de dollars d'actifs sous gestion.
Les fonds de continuation constituent désormais un aspect important du marché secondaire du capital-investissement et sont devenus une voie de sortie bien connue des fonds, parallèlement à d'autres types de transactions sur le marché secondaire. Ces autres types de transactions sont notamment la vente par les sociétés de gestion (LPs) de leurs intérêts dans un fonds à des investisseurs tiers ou de la vente d’actifs individuels d’un fonds directement par les investisseurs (GPs). Si ces transactions menées par les LPs et GPs peuvent attirer de nouveaux investisseurs, elles peuvent se faire à des prix inférieurs à la valeur des actifs sur le marché actuel. Le transfert des actifs dans des fonds de continuation est un moyen d’éviter de subir une décote. En plus d’offrir de la liquidité aux GPs, les fonds de continuation donnent la possibilité à de nouveaux investisseurs d’accéder à des actifs avec un historique connu.
La nature même des fonds de continuation signifie que les investisseurs et les sociétés de gestion doivent être scrupuleux en matière de valorisation, de conflits d'intérêts potentiels et de contrôle réglementaire. Néanmoins, leur essor témoigne de l'ingéniosité du marché à trouver des voies de sortie en période de blocage du marché.