Vérification de l'identité de la clientèle pour certains produits et services à faible risque

Blanchiment de capitaux et financement du terrorisme - décret 2023-63

Personnes travaillant
  • 14 avr. 2023

Introduire davantage de souplesse s’agissant des mesures de vigilance simplifiées 

Le décret n°2023-63 du 03 février 2023, a pour objectif d’introduire davantage de souplesse s’agissant des mesures de vigilance simplifiées, en faveur des épargnants et usagers des services bancaires, établissements de crédit et émetteurs de monnaie électronique.

Il traite des obligations d'identification et de vérification de l'identité des clients de prestataires de services de paiement pour des transactions en espèces de faible montant réalisées pour le paiement de factures de la vie courante. 

Les nouvelles dispositions visent à faciliter l'inclusion sociale et économique des personnes défavorisées exclues des circuits bancaires traditionnels, tout en respectant le cadre européen de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. 

Quels sont les apports du Décret ?

En premier lieu, le Décret vient faire évoluer les règles de vérification de l’identité des clients, en intégrant dans le Code monétaire et financier, un nouvel article R. 561-14-1-1, permettant aux émetteurs de monnaie électronique de différer la vérification de l'identité de leur client dans certaines conditions spécifiques.

En second lieu, le Décret vient compléter l'article R. 561-16 du même Code, par un 11°, intégrant parmi la liste personnes, services ou produits présentant un faible risque de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme « les paiements réalisés en espèces par une personne physique auprès d’un prestataire de services de paiement agissant pour le compte du bénéficiaire du paiement ».

Un allègement des mesures de vérification de la clientèle, encadré et conditionné

La nouvelle possibilité de différer la vérification de l’identité

Le Décret définit les conditions dans lesquelles les émetteurs de monnaie électronique sont autorisés à différer la vérification de l'identité de leur client et, le cas échéant, du bénéficiaire effectif de ce dernier.

Il est en effet prévu que, les Emetteurs de Monnaie Electronique (EME, mentionnés aux 1°, 1° ter et 1° quater de l'article L. 561-2 du Code monétaire et financier) peuvent différer la vérification de l’identité de leur client et, le cas échéant, du bénéficiaire effectif de ce dernier, jusqu’à 12 mois après la date de l’émission de l’instrument de monnaie électronique. 

Il y est toutefois procédé immédiatement, avant l'expiration de ce délai, lorsque l'une des conditions suivantes se réalise :

  • « La valeur monétaire chargée sur l'instrument de monnaie électronique ou les paiements réalisés excèdent 150 € sur une période de trente jours ;

  • Le montant cumulé de l'ensemble des chargements excède 1 000 € ;

  • L'instrument de monnaie électronique est utilisé pour réaliser une opération de paiement d'achat de biens ou services de consommation dont le montant unitaire est supérieur à 50 €, initiée par internet ou au moyen d'un dispositif de communication à distance ;

  • Les transferts de fonds mentionnés au d du 4° du I du Décret excèdent 50 € par opération ou un montant cumulé de 150 €. »

Le Décret vient ainsi apporter une flexibilité, pour les EME, dans la vérification de l’identité des clients à l’entrée en relation, permettant de différer la vérification jusqu’à 12 mois après la date d’émission de l’instrument de monnaie électronique.

Cette évolution présente ainsi un impact positif pour les EME, bien qu’elle soit limitée au strict respect des montants évoqués ci-dessus, ainsi qu’au respect de conditions cumulatives, venant impacter la mise en œuvre des évolutions précitées en matière de mesures de vigilance.

La possibilité de différer la vérification, dans le respect des conditions cumulatives

Le Décret prévoit que, les émetteurs de monnaie électronique peuvent différer cette vérification, lorsque les conditions cumulatives suivantes sont réunies :

  • L'absence de soupçon de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme ;

  • La vérification que le titulaire ne détient pas d'autre instrument de même nature auprès du même émetteur ;

  • L'instrument de monnaie électronique ne peut être chargé que par un moyen de paiement émis par une personne mentionnée au 1° de l'article L. 561-2, dont le détenteur a été identifié et a vu son identité vérifiée conformément aux dispositions des articles R. 561-5 et R. 561-5-2 du Code monétaire et financier, ou par un transfert de fonds en provenance d'un instrument régi par le présent article et émis par le même émetteur ;

  • L'instrument de monnaie électronique ne peut être utilisé que par des personnes physiques et dans les conditions prévues par le Décret ;

  • Le contrat conclu entre l'émetteur et le détenteur de l'instrument de monnaie électronique indique que cet instrument est régi par l'article R. 561-14-1-1.

Ainsi, en présence d’un soupçon de BC-FT, de l’absence de réalisation de l'une des conditions restrictives énoncées, ou du dépassement de l'un des seuils monétaires (>150 € sur 30 jours ou 1.000 € cumulés, paiements ou transferts unitaires >50 €), la vérification de l'identité doit être réalisée sans délai.

La souplesse accordée aux établissements de monnaie électronique reste ainsi très limitative dans son champ d’application.

Par ailleurs, il convient de différencier la vérification de l’identification des clients. En effet, si les règles de vérification évoluent avec le présent Décret, les mesures de vigilance concernant l’identification des clients restent quant à elles inchangées.

L’extension de la liste des personnes, services ou produits présentant un faible risque de BC-FT 

Le présent Décret intègre parmi la liste des personnes, services ou produits présentant un faible risque de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme prévue à l’article R. 561-16 du Code monétaire et financier, « les paiements réalisés en espèces par une personne physique auprès d’un prestataire de services de paiement agissant pour le compte du bénéficiaire du paiement ».

Cette intégration est conditionnée aux dépenses et montants mensuels suivants : 

  • Loyers inférieurs ou égaux à 600 euros dus au titre du logement locatif social ;

  • Factures d’eau inférieures ou égales à 200 euros ;

  • Factures de gaz et d’électricité inférieures ou égales à 150 euros ;

  • Factures de téléphonie inférieure ou égales à 50 euros ;

  • Cotisations d’assurance complémentaire santé, habitation et automobile dont le montant cumulé n’excède pas 300 euros ;

  • Frais de péages et de transport en commun inférieurs ou égaux à 50 euros.

Il est également précisé que, sans préjudice de l’application des dispositions de l’article L. 112-6 du Code monétaire et financier, un prestataire de services de paiement peut accepter les paiements réalisés pour les dépenses mentionnées ci-dessus, qui excèdent les plafonds indiqués, s'il s'assure que le montant total de ces paiements est inférieur ou égal à 1 200 € par mois.

Ainsi, les paiements précités, réalisés auprès d’un prestataire de services de paiement, intègrent désormais la liste des personnes, services ou produits présentant un faible risque de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme prévue à l’article R. 561-16 du Code monétaire et financier.

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Sébastien d'Aligny

Sébastien d'Aligny

Associé Financial Crime, PwC France et Maghreb

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