Vu par J. Bichon, Open banking Project Manager de BPCE et fondateur du Collectif API Thinking

L'Open banking en Banque et Assurance

  • Mars 25, 2022

Dans le cadre de l'étude sur les enjeux et défis de l'Open banking pour les acteurs bancaires et assurantiels, les équipes de PwC ont eu l’opportunité d’échanger avec Julien Bichon, Open banking Project Manager au sein du Groupe BPCE et fondateur du collectif API Thinking.

Bonjour Julien. Pourriez-vous vous présenter ?

Je suis Julien Bichon, project manager au sein du programme Open Platform & APIs de BPCE. J’œuvre au quotidien en tant qu’évangéliste : acculturer, communiquer, former, vulgariser, semer les graines d’APIs auprès des métiers pour que demain apparaissent de nouveaux cas d’usages, telle est ma mission.

J’ai créé le collectif API Thinking en mai 2020 qui rassemble tous les acteurs français autour des APIs. J’ai également co-créé France API dont la première édition aura lieu le 14 Juin 2022 : ce sera le premier événement majeur français réunissant autant d’acteurs francophones sur les enjeux des APIs. Enfin, j’interviens à l’université de Nantes (IAE) sur des disciplines autour de la gestion de projet, l’informatique...

A l’instar de l’Open banking excellence (OBE), la vocation du collectif API Thinking est de fédérer les acteurs français de l’Open banking. Quelles sont les initiatives prises et pourquoi sont-elles importantes pour que l’Open banking soit adopté ?

Même si l’enjeu initial était effectivement de fédérer les acteurs financiers français suite aux difficultés rencontrées de part et d’autre sur la mise en œuvre de la DSP2, rapidement nous avons ouvert à tous les secteurs d’activités (énergie, hospitalité, retail, public...).

L’objectif du collectif est ainsi de fédérer tous les acteurs qui lancent ou disposent déjà d’une démarche d’APIsation de leur système d’information. C’est un mariage d’opportunités entre acteurs business et acteurs orientés tech. Au-delà des sessions plénières avec des retours d’expériences concrets, nous avons différents chantiers qui permettent à chaque entreprise membre de se positionner sur les sujets qui l’intéressent : portail APIs, architecture et sécurité, gouvernance, les APIs numériquement responsables, communiquer auprès des consommateurs d’APIs, acculturer les producteurs d’APIs.

Cette collaboration d’entreprises, parfois concurrentes, parfois de secteurs différents, permet au collectif de puiser sa force dans ses membres, le tout dans le respect des lois anti trust. Nous avons en 2021 livré un guide sur la qualité d’une API, nous vous donnons rendez-vous cet été pour découvrir depuis notre site interne les nouveaux guides 2022.

Pour les services financiers, quels sont les cas d’usage de l’Open banking qui se démarquent dans les réflexions menées au sein de votre collectif ?

Depuis l’émergence de la DSP2, on ne compte plus les articles ou les webinars sur l’ouverture des SI dans les services financiers. Pour autant, nous ne sommes qu’au début, soyons pragmatiques. 

La période COVID particulière et l’écosystème concurrentiel a incité les banques à accélérer la digitalisation de leurs services, première étape de leur transformation digitale. Les établissements historiques sont dans l’obligation désormais d’œuvrer avec les nouveaux acteurs qui arrivent, encouragés par DSP2 ou présents sur des marchés de niches (KYC, entrée en relation, crédit immobilier, connaissance client…). La DSP2 ne peut plus être vue comme une menace mais comme une opportunité concurrentielle : ne pas travailler « contre » les fintechs mais avec les fintechs.

Les usages Bank as a service et Bank as a platform vont laisser la place à l’Open Platform : un mariage de raison entre le fait de fournir un service et le fait de consommer d’autres services, le tout en marque blanche, sans couture pour le client. 

Votre collectif, représentatif de la diversité de l’écosystème des services financiers, rassemble plus de 90 entreprises membres issues des secteurs bancaires et assurantiels. Comment les professionnels de la banque et de l’assurance appréhendent-ils le sujet de l’Open banking ?

Dans ces 90 entreprises, une majorité est issue effectivement du secteur bancaire (BNP Paribas, Crédit Agricole, Crédit du Nord, Floa, Groupe BPCE, My Money Bank, Oney, Société Générale), un peu moins de la moitié mais c’est le secteur le plus représenté à date. Des fintechs, par exemple Smartpush, MonEmprunt.com, Particeep, sont très impliquées à côté des acteurs historiques, que ce soit à l’intérieur des chantiers ou même des sessions plénières. Pourquoi ? Car ces fintechs ont toutes compris qu’il est plus facile de travailler main dans la main avec des producteurs et consommateurs d’APIs plutôt qu'entre producteurs d’APIs.

Ensemble, nous œuvrons pour des APIs éco responsables, travaillons pour définir un « modèle » de portail de bonne qualité (en terme de fonctionnalités, d’informations…). Les consommateurs d’APIs, que sont les fintechs, ont des envies, des exigences parfois, qu’il convient de travailler en accord avec les producteurs. 

Les banques traditionnelles nouent des partenariats et procèdent à des acquisitions de Fintech et d’entreprises numériques et informatiques afin de tirer pleinement parti de l’Open banking. Comment analysez-vous cette approche et crée-t-elle de nouveaux enjeux pour les banques traditionnelles ?

Récemment, la fintech française Bridge accueillera bientôt à son capital BPCE et le fonds d'investissement Truffle Capital.

Le premier palmarès Fintech 100 publié en mars 2022 éclaire la richesse et diversité de cet écosystème en pleine mutation. 86 % des fintech et assurtech français ont déjà mis en place un partenariat avec un acteur institutionnel ou un grand groupe, dont une majorité d’acteurs bancaires : c’est éloquent !

La libération des données accélère ce développement de partenariats entre fintechs et acteurs historiques. A moyen terme, la rentabilité et la croissance d’une banque dépendront de sa capacité à ouvrir son écosystème à ses partenaires, pour proposer des services et une expérience en adéquation avec les usages et les modes de vie de ses clients.

Quels sont les principaux freins ou obstacles que les acteurs bancaires et assurantiels perçoivent sur le sujet de l’Open banking et pourquoi ?

J’espère sincèrement qu’il ne faudra pas attendre davantage de régulation pour continuer cette transformation. Quand un acteur historique s’associe avec une fintech, il engage son image et sa réputation ; ce qui peut expliquer parfois une certaine frilosité.

De plus, l’opinion du secteur est partagée sur l’initiative. Le secteur bancaire s’approprie aisément des innovations numériques mais pour beaucoup d’entre eux, l’ouverture des données bancaires est perçue au mieux comme un coût et, au pire, comme une menace : c’est la mentalité qu’il faut changer. Cela passe par de l’acculturation et des exemples d’ouverture issues d’autres secteurs (transport, énergie, retail...). Au-delà du coût lié à cette ouverture, à l’ère de l’Open banking, les institutions bancaires craignent la « désintermédiation » avec leurs clients si leurs plateformes digitales sont moins attractives que celles des nouveaux acteurs.

Enfin, côté clients finaux, des études récentes laissent à penser qu’ils sont encore réticents à utiliser l’Open banking, une fois qu’ils en connaissent les contours : n’oublions pas que leur consentement pour autoriser le partage de données entre fournisseurs de services financiers est obligatoire. 

Le Royaume-Uni, la Suède et les autres pays nordiques apparaissent comme des pionniers de l’Open banking. Comment estimez-vous le positionnement et le niveau de maturité de la France sur le sujet ?

La France n’est pas la pionnière en cette matière. Par exemple, au Royaume-Uni, dès 2016, la CMA, l'autorité chargée de la concurrence et des marchés, fonde avec les neuf plus grandes banques du pays, l'Open Banking Implementation Entity (OBIE). Le rôle de cet organisme est d’établir les standards techniques et d’orchestrer les échanges entre l'ensemble des acteurs financiers de l’Open banking bien au-delà de la DSP2.

La France n’a pas à rougir et l’accélération constatée ces dernières années permettra de rattraper ce retard à l’allumage. Nous avons la chance sur notre territoire d’avoir pléthores d’acteurs fintechs prêts à révolutionner le paiement, le crédit, l’assurance etc.  Les initiatives de places, par exemple via notre collectif API Thinking, via notre événement France API, mais également avec Finance Innovation, France Fintech... permettent que l’Open banking ne reste pas une tendance de mode mais un vrai leitmotiv. 

Quelles prochaines tendances prévoyez-vous à moyen terme ? La France a-t-elle une chance de s’imposer comme une référence dans le domaine de l’Open banking ?

Dans un univers de plus en plus internationalisé, l’Open banking n’a pas de frontière. La révolution du paiement, une data de plus en plus optimisée et utile pour le client final et un KYC (onboarding rapide et simple pour le client) sont à mon humble avis les tendances émergentes de demain.

Tout cela dans une démarche Green, c’est aussi l’un des chantiers importants du collectif : la meilleure API est celle qui n’est pas produite. 

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Charles de Maleville

Charles de Maleville

Associé Consulting, PwC France et Maghreb

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