Après une nouvelle levée de fonds de 639 millions de dollars, Klarna, le fleuron suédois du paiement fractionné, est devenu la startup la plus valorisée des FinTechs privées européennes, à 46 milliards de dollars.
Les solutions de paiement fractionné, qui permettent aux consommateurs de payer en plusieurs fois sans frais, ont gagné en popularité dans le monde. Cela s’est notamment traduit dans les valorisations des FinTechs présentes sur ce marché.
En France, le marché du paiement fractionné, une des composantes principales du Buy Now Pay Later (BNPL), représente un encours de crédit de 10 milliards d’euros pour l’année 2020 (soit un bond de 66 % par rapport à 2019). Une croissance tout aussi fulgurante est également attendue dans le monde pour atteindre un encours d’environ 680 milliards de dollars d’ici 2025.
Face à la montée en puissance du paiement fractionné, le géant américain PayPal a décidé en septembre 2021 d’acquérir la FinTech japonaise Paidy pour un montant de 2,7 milliards de dollars. L’acquisition lui a ainsi permis de s’insérer dans la course du paiement fractionné. A l’image de Paypal, l’entreprise de paiement Block (anciennement nommée Square) s’inscrit dans la même lignée en rachetant la FinTech australienne Afterpay pour 29 milliards de dollars.
Même les jeunes pousses françaises du secteur, comme les FinTechs Alma, Pledg et Joe, ont bénéficié de la popularité de cette solution, leur permettant de conclure des levées de fonds significatives. Inexorablement, l'essor du marché s'accompagne d'une concurrence accrue entre Fintechs à travers le monde. Alors comment expliquer cet engouement ?
Le paiement fractionné s’est fortement développé en raison de la pandémie de Covid-19 et du développement rapide de l’e-commerce. En quelques mois, les e-commerçants, quelle que soit leur taille, se sont dotés de ces solutions qui permettent d’augmenter le panier moyen de leurs clients.
Selon un sondage OpinionWay pour Floa Bank (ex-Banque Casino) réalisé en 2021, 31 % des Français ont eu recours au paiement en plusieurs fois ces douze derniers mois.
Les FinTechs ont ainsi réussi à pénétrer le marché de l’e-commerce avec le modèle du paiement fractionné, offrant un coût d'emprunt plus faible et plus de transparence pour les consommateurs.
Les services de paiement fractionné répondent aux nouveaux modes de consommation des Millennials. Ces derniers sont plus réfractaires au crédit à la consommation classique que leurs aînés. Adeptes du « sur-mesure » et de l’instantanéité, ils apprécient pouvoir payer en trois ou quatre fois. Ainsi, les acteurs du paiement fractionné leur permettent de gérer leur argent de manière responsable et simple.
Toutefois, le secteur cible désormais un ensemble plus large de consommateurs. Mansa, la jeune pousse de la finance spécialisée dans le crédit aux indépendants et TPE, s’attaque également au paiement fractionné. La FinTech tricolore, qui a vu le jour en 2020, propose à ses clients de régler leurs factures en trois à douze fois.
S’agit-il d’un simple feu de paille ou les FinTechs du paiement fractionné vont-elles durablement s’imposer ? En cette fin d’année, c’est la question que se posent les gouvernements, les régulateurs et les institutions financières : les consommateurs doivent-ils se méfier de cette nouvelle solution de paiement, qui se développe rapidement chez les commerçants, et sur tous les continents ?
La question est tout à fait légitime : risque de surendettement, risque de fraude ou bien risque de crédit ; ces sujets vont mobiliser les acteurs concernés dans les années à venir. À titre d’exemple, la Commission européenne a proposé récemment d’intégrer les solutions de paiement fractionné dans la future directive sur le crédit à la consommation.
Le secteur des services financiers se retrouve à la croisée de ces nouveaux enjeux. Il se trouve contraint d’emprunter à marche forcée le chemin de la digitalisation et de l’innovation. Cela passe notamment par l’adoption d’une vision plus customer centric de son activité. Les grandes banques l’ont bien compris : en juillet 2021, BNP Paribas s’est ainsi porté acquéreur de 100 % du capital de Floa Bank. Les opérations de rachat pourraient, à terme, brouiller les frontières entre FinTechs et acteurs traditionnels du paiement en ligne.
Sans aucun doute, l’essor du paiement fractionné va continuer et les FinTechs vont être amenées à y contribuer davantage. Il n’est pas surprenant de voir de nombreux investisseurs s’y intéresser et de nombreux partenariats émerger, à l’instar de la collaboration entre Alma et Algoan ayant pour objectif de renforcer le modèle d’analyse du risque de crédit.
Comme le dit Marc Lanvin, Directeur Général adjoint de Floa Bank, dans une interview accordée à PwC France, les encours du paiement fractionné dans le monde font penser que les FinTechs de ce secteur dotées des meilleures technologies et des meilleures idées ont de beaux jours devant elles.