Décryptage économique #13 - Avril 2024

La finance durable au cœur du développement économique de l’Europe

Courbes financières
  • Publication
  • 30 avr. 2024

Intégrer des critères sociaux et environnementaux aux fondamentaux économiques est aujourd'hui un point d'ancrage incontournable pour l’ensemble des secteurs économiques.

 

Au niveau régional, la Commission européenne affiche, grâce au Green Deal porté par Ursula von der Leyen, sa détermination pour prendre le leadership dans le financement des technologies durables. Dans la transition écologique, ses progrès sont significatifs et la placent en tête du peloton par rapport aux États-Unis ou à l'Asie en termes d'efficacité énergétique. De plus, l'Union européenne est en avance par rapport à ses concurrents en matière de réglementation, notamment grâce à sa normalisation des données de durabilité. 

 

Mais, si l’Europe a les moyens de ses ambitions, reste que l’esprit d’une politique commune intégrée a du mal à émerger. Chaque pays au sein de l'Union européenne tend à définir sa propre stratégie industrielle verte de manière autonome et à court terme, ce qui contraste avec les contraintes des institutions européennes qui opèrent sur le long terme. 

 

Pour dynamiser ces projets, une piste demeure pour l’instant peu exploitée : la mobilisation de l'épargne nationale. Cette épargne, notamment celle de la France, associée aux fonds européens, peut permettre de répondre aux défis colossaux de la transition écologique. Or, le fléchage de ces ressources financières vers les financements verts demeure pour l'heure sous-optimal, malgré l'intérêt grandissant de l'opinion publique pour répondre à l'urgence climatique. 

Subprimes : les limites d’une finance sans contrôle

La crise des subprimes a été un catalyseur d’une remise en cause de la finance telle qu'elle s'était développée jusqu'alors, sans garde-fous. 

À partir de 2007, le recours excessif aux produits de titrisation avait abouti à une accumulation de dettes détenues par des particuliers américains incapables de les rembourser au moment du retournement de cycle, entrainant des défauts de paiement en chaîne sur ces prêts hypothécaires. La chute de la valeur des actifs sous-jacents qui s’en est suivie a provoqué une crise de confiance majeure dans le système financier mondial. Les institutions financières qui avaient massivement investi dans ces titres se sont trouvées en difficulté, certaines déclarant faillite.


Définition de subprime  : ce terme désigne les prêts immobiliers accordés à des emprunteurs qui disposent de faibles ressources. Plus risqués, ces prêts étaient aussi plus rémunérateurs pour les prêteurs, avec des taux d’intérêt plus élevés que ceux proposés aux emprunteurs les plus solides (prime rate). 
 

Cette période a marqué une prise de conscience au sein de la communauté financière : tout progrès technique n'est pas nécessairement bénéfique et une innovation sans contrôle préalable peut engendrer des produits toxiques susceptibles de déclencher une crise financière. Contrairement à la grande dépression de 1929, les banquiers centraux ont agi rapidement pour contenir la crise en injectant massivement des liquidités sur les marchés financiers. 

Face à une méfiance généralisée qui avait paralysé le système bancaire, la Réserve fédérale américaine (Fed) et la Banque centrale européenne (BCE) ont assumé le rôle de prêteurs en dernier recours. La restauration de la confiance était cruciale pour permettre aux institutions financières de continuer à s'accorder des prêts et assurer le financement de l'économie réelle. La confiance demeure le critère incontournable de toute transaction économique et financière qui repose sur des variables temporelles générant, de facto, de l'incertitude.

La confiance constitue une condition sine qua non de bon fonctionnement des marchés.

Face aux dysfonctionnements révélés par la crise des subprimes, la sphère financière a dès lors cherché à mettre en place des garde-fous. C'est dans ce contexte que la finance durable et responsable est apparue comme une des réponses aux déséquilibres et aux excès des marchés financiers. Cette approche vise à créer un impact positif à long terme, en tenant compte à la fois des rendements financiers et de critères de durabilité tels que la préservation de l'environnement, le respect des droits de l'homme, l'équité sociale, la transparence et une gouvernance d'entreprise robuste.

Progressivement, ont été élaborés des produits financiers de long terme prenant en compte non seulement les rendements (la performance financière) mais aussi les préoccupations environnementales, les aspects sociaux et de gouvernance (la performance globale).


Définition de la finance durable : également connue sous les termes de finance responsable, finance éthique ou finance verte, cette approche de l'investissement et de la gestion financière intègre des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) dans les décisions d'investissement. Elle constitue un levier indispensable pour répondre aux enjeux du développement durable.
 

La finance durable englobe diverses pratiques et stratégies, notamment l'investissement socialement responsable (ISR), l'investissement d'impact, l'intégration ESG dans l'analyse financière traditionnelle, le financement participatif (crowdfunding) pour des projets durables, etc. Les investisseurs institutionnels, mais aussi les fonds de pension ou les gestionnaires d'actifs, adoptent des critères ESG dans leurs allocations d'investissement, reconnaissant ainsi l'importance croissante des considérations de durabilité dans la création de valeur à long terme.


Quelle est la différence entre finance durable et ISR ? 

L’investissement socialement responsable (ISR) est l’un des instruments de la finance durable. Cette stratégie cherche à concilier performance financière et développement durable en sélectionnant les valeurs dans lesquelles investir selon à la fois des perspectives de rentabilité et des critères ESG, Un label ISR a été créé par le gouvernement en 2016 pour distinguer les fonds composés de titres d’entreprises respectant ces critères.
 

La finance durable se structure

D’après la Global Sustainable Investment Alliance (GSIA), 30 000 milliards d’euros se réclament de l’ISR dans le monde. 

La branche de la finance durable qui s’occupe de l’ISR s’efforce de respecter des critères éthiques, sociaux prédéfinis. Dans ce cadre, les industries ou les entreprises considérées comme insuffisamment responsables, telles que celles liées au tabac, aux armes ou à d'autres activités controversées, sont écartées de leur cible d’allocation. C’est donc à travers la sélection d'actifs financiers (actions, obligations, fonds communs de placement, etc.), que l’ISR aspire à respecter des critères éthiques et sociaux spécifiques.

L’Europe joue un rôle moteur dans le développement de ces investissements verts et responsables. Elle s’appuie sur le Pacte vert pour l’Europe, qui l’engage à garantir la fin des émissions nette de gaz à effet de serre d’ici 2050 tout en favorisant une croissance économique conforme à des normes sociales et environnementales responsables. Pour financer cette ambition, le plan de relance NextGenerationEU, avec un budget de 750 milliards d’euros associé au budget de long terme de l’UE 2021-2027, prévoit d’investir plus de 1 800 milliards d’euros dans la transition verte, numérique et sociale.

L’Union européenne s’est par ailleurs dotée d’un cadre réglementaire pour encadrer et donner une ligne directrice aux investissements responsables et solidaires, ce qui a permis de structurer le marché. Ces normes nouvellement imposées permettent, de même, de répondre aux préoccupations croissantes concernant l’écoblanchiment et autre x-washing.  

Trois réglementations pour le développement de la finance durable :

1/ La taxonomie verte européenne. Ce système de classification permet de distinguer les secteurs qui sont verts de ceux qui ne le sont pas (voir page 7 de l’étude de PwC sur la finance durable). Les critères retenus pour établir la liste des activités économiques considérées comme durables sur le plan environnemental sont en ligne avec l’objectif de neutralité carbone et de l’accord de Paris. 

2/ La Sustainable Finance Disclosure Regulation (SFDR). Ce règlement vise à offrir une information plus transparente sur la qualité des caractéristiques environnementales et sociales des produits financiers permettant aux investisseurs une meilleure adéquation de leurs investissements avec leurs objectifs de durabilité. Il propose notamment une typologie permettant de mieux identifier les actifs relevant de la finance durable, l’idée étant d’encourager le fléchage des capitaux vers celle-ci. Entrée en vigueur en mars 2021, la SFDR s’applique à tous les prestataires de services d’investissement et aux gestionnaires d’actifs qui fournissent des services financiers dans l’Union européenne.

3/ La Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD). Cette directive concerne toute la réglementation du reporting pour pouvoir vérifier les affirmations de la SFDR et de la taxonomie verte. Elle vise ainsi à harmoniser les informations de durabilité fournies par les entreprises européennes pour plus de comparabilité, de transparence et de qualité de reporting de durabilité. Celui-ci porte sur les données ESG de l'entreprise à l'issue d'une analyse de double matérialité précisée dans les textes :

  • des informations environnementales incluant les mesures prises pour atténuer et s'adapter au changement climatique, préserver la biodiversité et optimiser l'utilisation des ressources naturelles ;

  • des informations sociales couvrant l'égalité des chances, les conditions de travail, ainsi que le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

  • des informations ayant trait à la gouvernance telles que le rôle et les pratiques des organes d'administration, les activités de lobbying, ainsi que la gestion des relations avec les partenaires commerciaux.

Les informations divulguées par l'entreprise doivent être vérifiées par un commissaire aux comptes (CAC) ou par un organisme tiers indépendant (OTI) accrédité.  Ces informations sont placées, comme les comptes, sous la responsabilité du comité d'audit, ou d'un autre comité du conseil par délégation.

Enfin, l'intention du régulateur est de faire de l'information de durabilité un élément fort de la performance de l'entreprise en parallèle de l'information financière.

Les normes organisent la finance durable

La mise en œuvre progressive de la CSRD va débuter en 2025 pour les comptes 2024 pour les grandes entreprises et ne concernera les PME cotées qu'à partir de 2026. 

Dans un contexte de bataille technologique et de concurrence accrue entre les deux autres puissances mondiales que sont la Chine et les États-Unis, de nombreuses firmes européennes expriment actuellement leur agacement face à l'accumulation de normes et de règlements. 

Pour Sylvain Lambert, Associé PwC France et Maghreb, l’Union européenne a pris conscience que, pour façonner l’économie de demain, il faut être capable de faire les bonnes analyses pour prendre les bonnes décisions. C'est dans cette optique que la réglementation entre en jeu. La CSRD s’accompagne de normes de durabilité, les European Sustainability Reporting Standards (ESRS), qui offrent un meilleur cadre d’analyse et de comparaison dans la prise de décision. Il observe par ailleurs que des entreprises internationales non européennes se préparent déjà à appliquer ces nouvelles règles européennes même sans y être contraintes à date. L’idée est d’être prêt et en avance sur les concurrents. Rappelons qu’à terme, la CSRD s'appliquera bien aux entreprises non européennes ayant des filiales en Europe. Ainsi à partir de 2029, tout groupe mondial présent en Europe devra, par l'intermédiaire de ses filiales, publier un rapport de durabilité monde au format CSRD. C'est une réponse forte de l'Europe aux questions légitimes des entreprises relatives aux distorsions de concurrence suscitées par l'accélération réglementaire de la Commission européenne.

Tout comme les normes IFRS ont standardisé les données comptables pour permettre une meilleure évaluation financière des entreprises, la CSRD a pour objectif d’offrir plus de transparence et de points de comparaison dans les données de durabilité, désormais indispensables pour évaluer une entreprise, comme le démontrent les résultats de l'étude de PwC sur le capital-investissement. Dans le monde, près de 70% des sociétés financières du secteur priorisent l’ESG dans leur stratégie d’investissement pour créer de la valeur.  

Par ailleurs, la Chine vient de publier une réglementation très similaire à la CSRD. Les trois principales bourses chinoises - Shanghai, Shenzhen et Hong Kong - devront se mettre en ordre de marche pour fournir d’ici 2026 des informations extra-financières standardisées.

70%

des sociétés de capital-investissement incluent l’ESG dans leurs stratégies de création de valeur

Financer la technologie verte en question

L’Union européenne se veut leader dans le financement de l’écosystème en technologies de demain. 

À cet effet, le Parlement européen a adopté fin 2023 une loi visant à stimuler la production locale de technologies vertes, avec pour objectif de produire au moins 40% de celles-ci sur le territoire d'ici 2023. Cependant, malgré cette initiative, dans les domaines clés du développement durable tels que les batteries, l'hydrogène vert et les véhicules électriques, les acteurs dominants demeurent asiatiques. Par exemple, aucun fabricant européen ou américain ne figure parmi les dix premiers au niveau mondial dans la production de batteries lithium-ion.

40%

des technologies vertes produites localement : l’objectif de l’UE

Cette réalité soulève la question cruciale du financement. L'Union européenne peine à soutenir financièrement les entreprises évoluant dans ces secteurs de pointe sur le continent, en raison de leur taille. En grande majorité, il s'agit de start-ups, PME ou ETI. 

L'UE peine à soutenir financièrement les entreprises évoluant dans ces secteurs de pointe sur le continent, souvent de petite taille : start-ups, PME ou ETI.

Plusieurs raisons peuvent expliquer ces dysfonctionnements au niveau des financements. D’une part, les exigences administratives et la complexité des dossiers à constituer en Europe pénalisent l'accès au financement pour les entreprises, en particulier les start-ups et les PME. Or, ce sont précisément ces dernières qui sont à la pointe de l'innovation dans le domaine des technologies vertes au sein de l’UE. Benoît Merland, Directeur PwC France et Maghreb, explique qu’entre la constitution d’un dossier de financement et le versement des fonds européens, il faut compter un délai moyen de deux ans en France. Or, pour une start-up qui a, de fait, une existence réduite, cette échéance est inadaptée. L'innovation requiert rapidité et flexibilité pour les entrepreneurs, mais les instances européennes peinent à s'adapter à ces exigences. 

Simplifier et coordonner les processus de financement

Face à ces freins institutionnels, Enrico Letta, ancien président du Conseil italien, vient à la demande du Conseil européen de rendre un rapport sur le marché unique. Selon lui, l’Europe doit « créer une union de l’investissement, une union des marchés financiers européens, un grand marché qui mobilise à la fois ressources publiques et capitaux privés pour financer tous ces besoins nouveaux ». La fragmentation des sources de financement et les initiatives industrielles disparates empêchent l’UE de créer des mastodontes dans les technologies vertes, à l’instar des entreprises américaines ou chinoises.

Vient s’ajouter à cela la frilosité des Européens face au risque. Les investisseurs européens se montrent généralement plus réticents que leurs homologues américains à financer des entreprises présentant des risques élevés, même si leur contenu technologique est à forte intensité et que leur potentiel de rentabilité à long terme est avéré. Pour Yoann Derriennic, Associé PwC France et Maghreb, il est essentiel en Europe d'adapter les outils de financement à la maturité des projets. Actuellement, les Européens restent trop tièdes dans la prise de risque, exigeant un nombre excessif de critères de sélection en matière d'innovation.

Il est essentiel d'adapter les outils de financement à la maturité des projets. Aujourd’hui, les Européens restent trop tièdes dans la prise de risque, exigeant un nombre excessif de critères de sélection en matière d'innovation.

De plus, la concurrence internationale, notamment avec l'Inflation Reduction Act (IRA), entrave le déploiement des entreprises européennes spécialisées dans les technologies vertes au sein de l’UE. Les États-Unis, grâce à leurs ressources financières colossales (le budget de l’IRA s’élève à 350 milliards de dollars), investissent massivement dans ce secteur, cherchant à combler leur retard par rapport à l’UE. En effet, l'Europe s'est distinguée par son efficacité énergétique par rapport aux États-Unis et aux pays asiatiques. 

Selon les analyses du Net Zero Economy Index de PwC en 2023, l’UE a besoin de moins d’énergie par unité de production : 2,39 TJ pour un million de dollar de PIB en Europe, contre 3,77 TJ aux États-Unis. Pour Olivier Muller, Associé PwC France et Maghreb, cette meilleure performance européenne peut s’expliquer par la faiblesse des ressources énergétiques internes, qui pousse les entreprises européennes à optimiser leur consommation d’énergie.

2,39

TJ par million $ de PIB en Europe vs. 3,77 TJ aux États-Unis

Avec l’IRA, les États-Unis semblent chercher à attirer les entreprises européennes sur leur territoire, profitant de leur potentiel technologique mais aussi de leur avance en matière d'efficacité énergétique. Cette stratégie viserait ainsi à encourager la diffusion progressive de la culture européenne axée sur une utilisation plus sobre en énergie.

Intensité énergétique par pays et par unité produite en 2022

 

Térajoule (Tj) / million $ de PIB

Monde

3,68

USA

3,77

UE

2,39

Allemagne

2,32

France

2,22

Italie

2,01

Source : Net Zero Economy Index 2023, PwC

Pour surmonter ces défis, l'UE doit simplifier les processus de financement et coordonner plus efficacement les sources de financement. Il est également nécessaire d'ajuster les priorités afin de mieux répondre aux besoins des entreprises spécialisées dans les technologies vertes, notamment en améliorant la propension au risque des investisseurs européens.

L’épargne nationale en appui des financements verts

Le manque d'incitation des épargnants européens à investir dans les technologies vertes demeure un frein au développement de ce secteur dans l’UE. 

C’est un réel manque à gagner car rappelons que le niveau d’épargne au sein de l’Union européenne est élevé, avec un taux moyen par ménage de 14,0% du revenu disponible brut dans la zone euro. 

La France se classe dans le top 5 des pays où l'épargne est la plus importante, juste derrière l'Allemagne, les Pays-Bas et le Luxembourg. Le taux d'épargne y était de 17,4% en 2022, soit un stock de plus de 6 000 milliards d'euros (hors immobilier). Or, une part significative de cette épargne reste placée sur des comptes bancaires peu rémunérés ou en assurance vie, principalement pour bénéficier d'avantages fiscaux attractifs. Les épargnants hésitent souvent à s'engager dans la gestion active de leurs liquidités par manque de temps ou par manque d’intérêt, rendant ainsi difficile la compréhension de l'impact de leur épargne sur le financement de l'économie. 

Pourtant, en introduisant une dimension sociale ou environnementale à ces investissements, il est possible de créer de nouvelles opportunités et susciter un intérêt accru pour le secteur financier. L'ISR joue un rôle crucial dans cette démarche en rendant les marchés financiers plus accessibles aux non-initiés. 

Pour les épargnants, le développement durable représente une voie d'accès privilégiée pour découvrir ou approfondir le monde de la finance tout en préservant la recherche du rendement.

Avec un label ISR, l’investissement devient multicritère, associant rendements financiers et critères extra-financiers, comme le respect de l’environnement, le bien-être des salariés dans l’entreprise ou la bonne gouvernance au sein de cette dernière. Il place ainsi la finance au cœur des grands enjeux environnementaux et sociaux et permet de renouer avec les grandes thématiques compréhensibles par tous. Les épargnants ont l’opportunité de contribuer, via ces investissements ISR, à financer une économie plus responsable sans pour autant négliger la performance financière. 

Malgré ces constats et les efforts déployés au cours des dernières années pour promouvoir l'ISR auprès des épargnants, son adoption reste encore limitée dans la gestion de l'épargne. Selon Alexis Masse, président du Forum pour l'Investissement Responsable (FIR), les institutions bancaires ont souvent privilégié la promotion de niches fiscales au détriment de la sensibilisation aux produits financiers et à leur rôle dans le financement de l'économie.

Vers quels supports d’investissement responsable ?

L’investissement responsable et durable reste encore peu connu ou mal adapté pour les épargnants. 

Or, nous savons qu’une grande partie de l’épargne en France est fléchée vers l’assurance vie.  Depuis le 1er janvier 2020, la loi Pacte impose aux assureurs de proposer à leurs clients au moins un support ayant obtenu le label ISR ou Greenfin, premier label d'État dédié à la finance verte, ou investi en partie dans la finance solidaire.  

Rappelons que le portefeuille de l’assurance vie est majoritairement constitué d’obligations. C’est donc sans doute vers cette classe d’actifs que se porte le plus fort potentiel de développement de l’investissement responsable. Ainsi, les obligations vertes (green bonds) peuvent représenter un segment à développer auprès des épargnants. En effet, ces obligations permettent de soutenir des initiatives durables dans les projets écologiques, contrairement aux obligations traditionnelles où les liquidités sont allouées à des fins diverses.  

Dans ce domaine, l’État français fait figure de proue ayant porté son encours global d’obligations vertes à près de 70 milliards d’euros. Cependant, ce chiffre doit être mis en perspective par rapport au total des émissions obligataires du Trésor français, qui s'élève à plus de 2 500 milliards d'euros. 

70 Md €

Encours global d’obligations vertes de l'Etat français

À ce stade, il est clair que l'Union européenne dispose des capacités de financement nécessaires pour soutenir la technologie verte de demain. Le plan NextGenerationEU a posé les bases, mais sa mise en œuvre requiert un partenariat public-privé afin que les investissements dans ce secteur soient à la hauteur des enjeux.

Reste à déterminer pour la France les mesures à prendre pour orienter davantage l'épargne nationale vers l’investissement responsable et ainsi soutenir le financement des technologies vertes. La fiscalité a souvent été un levier efficace pour influencer les décisions des ménages. Ainsi, envisager des incitations fiscales spécifiques pour encourager les épargnants à consacrer une partie de leurs fonds à l’investissement responsable semble être une piste à explorer.  

Par ailleurs, rappelons que le livret A, largement plébiscité par les Français en matière d'épargne, a été initialement créé pour financer le logement social et a toujours remporté un vif succès. S'inspirer de ce modèle pour promouvoir les investissements dans les technologies durables semble de même être une voie à explorer.

Orienter l'épargne nationale vers l’investissement responsable peut jouer un rôle crucial dans le financement des technologies vertes, avec des incitations fiscales spécifiques et la création de supports adéquats innovants.

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Marion de Lasteyrie

Marion de Lasteyrie

Directrice Relations Extérieures et Communication, PwC France et Maghreb

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