« Je connais les forces et faiblesses de chacun de membre de la famille. Je m’attache à garder tout le monde en forme pour ne pas avoir à traiter des maladies plus graves, maladies qui engagent le pronostic vital ».
Les événements inattendus, de plus en plus variés, se succèdent à un rythme qui s’accélère. Les CEO doivent faire face à des conflits géopolitiques, des événements climatiques violents ou encore des cyberattaques. Les épisodes de crises se succèdent, nécessitant de la part des équipes et du CEO des ajustements, non seulement des pratiques, mais aussi des objectifs.
L’audit interne est asynchrone par rapport à cette accélération : les stratégies décidées un an auparavant sont obsolètes, car il a fallu les adapter aux nouvelles contraintes, d’où qu’elles viennent.
Pour poursuivre avec la métaphore médicale, lorsqu’un patient consulte son médecin avant un marathon, le praticien vérifie différents paramètres avant de donner son autorisation. L’auditeur interne peut devenir cet œil extérieur qui prend en compte les atouts et les faiblesses de l’entreprise avant que la stratégie ne soit mise en œuvre.
Il ne s’agit pas d’une course mais d’objectifs tels que :
Il n’est pas question de challenger la stratégie qui a été décidée en conseil d’administration, mais bien de vérifier et de valider les options prises : éviter que le sportif aille puiser dans ses réserves dès le départ pour atteindre ses objectifs, par exemple. L’analyse de la stratégie permet de révéler des erreurs et d’ajuster des projets avant la mise en œuvre.
« Contrairement à l’audit interne tel que nous le réalisons aujourd’hui, il n’est pas question d’être complètement exhaustif pour l’étude de la stratégie. Il n’y aura peut-être que 15 points identifiés sur les 30 et nous passerons à côté de 50 % des problèmes. Mais cette quinzaine de sujets permettra certainement à l’entreprise de réaliser plus facilement ses objectifs ».
L’audit de la stratégie permet de révéler les erreurs qui n’ont pas toujours été décelées par les équipes chargées de la mise en œuvre. Cette situation est plus courante que l’on imagine.
La 28e Global CEO Survey menée par PwC apporte des informations sur les processus de prises de décision stratégique. Et les résultats sont très intéressants. La très grande majorité des dirigeants « évaluent la qualité de leur décision en fonction des résultats plutôt que de l’approche qui a été suivie ». Le process n’est pas interrogé par la majorité des chefs d’entreprise : l’intuition et la chance ne sont pas des guides fiables. Il est fondamental de sécuriser la qualité des décisions avec des processus plus sûrs.
L’intervention d’un auditeur interne au moment de la prise de décision est une solution pour valider le process. Par ailleurs, les dirigeants français sont une minorité à prendre le temps d’analyser les opportunités ratées (35 % des dirigeants, 28e Global CEO Survey). Le résultat est le même pour l’affirmation suivante : « je prends du recul et j’évalue si mes choix sont mauvais ».
Ce temps consacré à l’évaluation des forces et faiblesses d’un projet n’est pas toujours dans l’ADN des chefs d’entreprise. Les décisions sont prises rapidement, dans des situations de tension qui ne laissent pas la possibilité d’analyser froidement les défauts du projet.
Un conseiller stratégique pourrait procéder à une analyse d’autant plus pertinente qu’il connaît bien l’entreprise. Il est capable de soulever la question de la compétence d’un service qui n’a pas les ressources pour mener à bien le projet. Il faut procéder à des recrutements avant de lancer l’opération, par exemple.
S’il a une connaissance globale de tous les services de l’entreprise, l’auditeur interne fait aussi appel à des spécialistes.
« Il faut s’appuyer sur des compétences fonctionnelles spécifiques. Personnellement je prends systématiquement des experts pour appuyer mon équipe d’auditeurs internes ».
Et c’est l’atout maître d’une organisation comme PwC : il est facile de mobiliser un spécialiste des M&A ou de l’entreprise transformative.
La stratégie est alors analysée pour détecter les points faibles avant qu’elle ne soit mise en œuvre. Le diagnostic est établi : des mesures correctives peuvent être prise avant le lancement de l’opération.
Ce vieux slogan est toujours d’actualité pour les nouvelles missions des auditeurs internes. Paul Le Nail l’a déjà constaté : « Une fois que l’on a fait un audit de ce type, la direction générale nous rappelle fréquemment pour de nouveaux audits… et souvent elle nous demande de délaisser nos travaux sur le transactionnel. Ce qu’il ne faut surtout pas faire ! »
Les freins sont levés dès que les nouvelles compétences de l’auditeur interne sont testées. L’auditeur apprend à ne pas délivrer un audit complet et précis, mais une évaluation des risques et bénéfices. Le chef d’entreprise dispose quant à lui d’une validation ou d’une mise en garde sur la mise en œuvre de la stratégie.
« Lorsque des projets d’une entreprise ont échoué deux ou trois fois, il devient vital de réussir dans l’exécution du prochain objectif. Le rôle de conseil n’existe pas et pourtant il est plus important de vérifier la faisabilité du projet que la conformité des notes de frais. Même si cela reste incontournable » assure Paul Le Nail.
L’évolution de la fonction de l’auditeur interne n’est pas seulement une vision de Paul Le Nail, mais bien une volonté exprimée lors d’une enquête Vision 2035 de l’IIA (Institute of Internal Auditors).
À la question « qu’est-ce qui vous passionne le plus dans l’exercice de l’audit interne ? », la réponse qui arrive en tête avec 71 % des suffrages est « ajouter de la valeur à l’entreprise ». L’auditeur interne de demain sera un conseiller stratégique !