Quelles sont les tendances de consommation des Français en 2023 ?

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Quelles sont les tendances de consommation des Français en 2023 ?

790€ ! C’est ce que les Français devraient dépenser en plus pour leurs courses du quotidien en 2023.

Si les consommateurs Français restent attachés à leurs habitudes de consommation, ils prévoient d’en modifier certaines face à l’inflation galopante et aux pénuries qui mettent à mal leurs portefeuilles. En ce début d’année, les Français sont tiraillés entre leur envie de consommer mieux pour manger mieux et le critère du prix qui reste le facteur numéro 1 dans leur parcours d’achat. Les acteurs du secteur doivent repenser leur stratégie et s’adapter à ces nouvelles habitudes de consommation.

Quelles sont les grandes tendances de consommation des Français en 2023 ?

Découvrez dans ce podcast, présenté par Raphaëlle Duchemin, les grands enseignements de la PwC Global Consumer Insights Survey avec :

- Jean Pujol, Directeur Retail & Consumer, Strategy&, l'entité conseil en stratégie de PwC

- Laëtitia Moukarzel, Senior Manager Retail & Consumer. Strategy&, l'entité conseil en stratégie de PwC

Raphaëlle Duchemin : C'est une des courbes que même les ménages sans être économistes, connaissent et regardent, parce qu'elle a une incidence directe sur notre portefeuille. En cette année 2023, il faut bien reconnaître que cette courbe qui grimpe n'est pas de nature à rassurer les Français sur leur pouvoir d'achat. L’inflation devrait atteindre 6% avant de ralentir l'an prochain. Mais comme le consommateur, ne croit que ce qu'il voit pour le moment, et bien, c'est sur les prix qu'il a les yeux rivés et eux aussi montent en flèche. Les experts ont fait les comptes pour nous et figurez-vous que la note est salée : les courses devraient nous coûter 790€ de plus en moyenne cette année. Alors, que vont faire les familles, vont-elles changer leurs habitudes pour grappiller quelques euros ?

PwC a mené l'enquête dans son Global Consumer Insights Survey en s'appuyant sur la façon dont nous avons consommé et aussi sur nos intentions pour le début 2023. 9180 personnes interrogées dans 25 pays, 500 chez nous et des différences notables. Je suis Raphaëlle Duchemin et nous allons ensemble nous intéresser à notre comportement d'acheteurs en période d'instabilité et de budget contraint.

S'octroyer une journée de lèche-vitrines, se faire un petit plaisir en flânant dans les magasins, voilà qui, aujourd'hui en 2023, paraît presque désuet. Comme si, depuis le Covid-19, notre manière d'acheter avait durablement été modifiée. Alors, avons-nous vraiment changé nos habitudes ? Si oui, pourquoi le faisons-nous ? C'est Jean Pujol et Laëtitia Moukarzel qui vont nous aider à mieux comprendre comment les Français gèrent les cordons de leur bourse.

Laëtitia, bonjour

Laëtitia Moukarzel : Bonjour

Raphaëlle Duchemin : Vous êtes Senior manager chez PwC Strategy&, et Jean Pujol, bonjour, bienvenue

Jean Pujol :  Bonjour

Raphaëlle Duchemin :  Vous êtes  directeur en grande distribution, également chez PwC Strategy&

Raphaëlle Duchemin : Première question pour tous les 2, que se passe-t-il ? Est-ce que la hausse des prix a durablement transformé les Français en fourmis ?

Laëtitia Moukarzel : Des fourmis, ça je ne sais pas en tout cas effectivement il y a une inflation qui est présente et les consommateurs la ressentent. Quand on leur demande comment est-ce qu'ils souhaitent dépenser dans les prochains mois,  entre 40 et 50% des Français, se disent prêts à réduire leurs dépenses. Quand on a posé cette question il y a un an, c'était plutôt entre 20 et 30%, donc cette proportion a doublé, voire triplé, sur certaines catégories de produits. Donc oui, les Français ressentent l'inflation et vont s'y adapter.

Raphaëlle Duchemin : On avait pourtant, je crois, observé après le Covid-19 une sorte de regain de consommation. Là, finalement, avec l'inflation, on sent une certaine prudence. La tendance est en train de s'inverser. Forcément, j'ai envie de dire.

Jean Pujol : Disons que la tendance a repris mais effectivement les consommateurs, et là c'est une nouveauté par rapport aux études qu'on mène tous les ans, disent qu'ils vont faire attention mais sur tous les types de produits. Et la vraie nouveauté cette année, c’est que ça concerne aussi les courses de base que sont l'alimentation, la santé et la beauté alors que les années précédentes les gens disaient qu'ils allaient faire attention, mais dans des catégories plus plaisirs ou moins indispensables de leurs achats.

Raphaëlle Duchemin : Effectivement c'est la nouveauté Jean Pujol, ça touche tous les produits. On voit quand même, quand on regarde l'étude, que les ménages ont cherché à faire des économies sur tous les secteurs. Vous l'avez dit, la nourriture, la santé, le bricolage, les voyages. Finalement, rien n'échappe aujourd'hui au tour de vis. On a une diminution des dépenses qui est autour de 40%. 

Laëtitia Moukarzel : Oui exactement, toutes les catégories sont touchées de manière identique.

Raphaëlle Duchemin : Ça vous l'expliquez ? C'est vraiment la peur de l'inflation, la peur du lendemain ?

Laëtitia Moukarzel : C'est une consommation tout simplement prudente dans les adaptations de comportements. On voit également que les Français vont avoir tendance à plus s'orienter vers les promotions, il y a vraiment une prudence qui est recherchée dans les achats.

Raphaëlle Duchemin : En revanche, ce qu'on voit aussi dans l'étude, c'est que les consommateurs sont attachés aux marques, attachés à leurs produits, à ce qu'ils aiment consommer. Est-ce que ça signifie qu’ils vont se serrer la ceinture plutôt que de changer leurs habitudes réelles de consommation ? 

Laëtitia Moukarzel : Alors effectivement, il y a un attachement aux marques qui est présent et c'est notamment du fait du contexte de rupture qu'on expérimente ces derniers temps. Si les Français sont attachés à une marque spécifique, ils vont tout faire pour essayer de la trouver, quitte à changer de canal d'achat. Donc s’ils achètent en ligne habituellement et qu'ils ne trouvent pas le produit, ils vont s’orienter vers les magasins et à l'inverse s’ils achètent en magasin, ils vont plutôt s'orienter en ligne pour pouvoir trouver ce produit. Ça ne les empêchera pas de potentiellement changer de marque ou de changer de produit s'il le faut. Dans ce contexte inflationniste ce n’est pas forcément le premier comportement qui a été remonté.

Raphaëlle Duchemin : Pourtant, certaines études montrent que les magasins à bas coût, les hard discount comme on les appelle, ont enregistré un trafic plus important. Est-ce que ça, Jean Pujol, c'est quelque chose qui devrait se confirmer ?

Jean Pujol : Oui, ça se confirme d'autant plus que, au-delà des gains de parts de marché de ces magasins-là, les acteurs traditionnels que sont les Carrefour ou les Mousquetaires, eux aussi dans leur stratégie mettent plus de discount et de focus sur le prix et la promotion. Ces dernières années les stratégies étaient orientées sur le mieux manger, le manger plaisir, aujourd’hui, ces notions-là sont toujours présentes parce que ce sont des tendances de fond fortes, mais la notion de prix, de promotion est beaucoup plus présente et donc l'ensemble des acteurs va chercher à se positionner. 

Raphaëlle Duchemin : C'est donc du ponctuel pour le moment. Est-ce que ce que dit votre étude c'est aussi que le consommateur cherche d'abord les promotions avant de se dire je change d'enseigne et je vais faire mes courses ailleurs ?

Jean Pujol : Dans un premier temps oui. C'est-à-dire que les consommateurs vont d'abord regarder les promotions dans les enseignes où ils ont l'habitude de faire leurs courses. Parce que les courses, et notamment quand on parle de la grande consommation, c'est aussi un comportement d'habitude, les gens vont dans leurs enseignes quasiment toutes les semaines. Cependant, l'étude montre que si le produit, qu'il pense acheter de marque nationale n'est pas au prix où ils peuvent se l'accorder, ils vont se rabattre soit vers d'autres canaux, d'autres distributeurs, soit vers d'autres marques un peu moins chères, qui peuvent être des marques de distributeurs ou d'autres marques.

Raphaëlle Duchemin : Alors, pour des raisons toujours de hausse de prix, on va réduire les produits de luxe et augmenter dans le panier les fameuses entrées de gamme. Mais est-ce que ça n'est pas aussi, une tendance de fond, qui est en train de se généraliser dans la population française ? Une prise de conscience finalement, sur ce qu'on appelle la société de consommation. 

Laëtitia Moukarzel : Alors effectivement, on a une orientation plutôt vers les produits d’entrée de gamme et de marque distributeur dans un contexte inflationniste, plus que bio et haut de gamme. Effectivement, on voit bien qu'il y a une grosse souffrance en ce moment sur les acteurs qui sont concentrés sur ce segment de produit. Ce n’était pas forcément quelque chose qui était présent avant. Est-ce que c'est durable ? L’avenir ne nous le dira. Ce n’est pas forcément quelque chose pour lesquels on a des signaux faibles aujourd'hui.

Raphaëlle Duchemin : C'est quelque chose qui est lié uniquement à l'inflation, selon vous, ou peut-être plus des raisons de comportement, de manière générale, de la société ?

Jean Pujol : Même en période de forte inflation, il y a une partie non négligeable de la population qui fait ses courses à quelques euros près. Et là bien entendu, la forte inflation sur les produits alimentaires mais aussi sur l'ensemble des autres produits fait que cette proportion-là a augmenté. L'inflation étant un accélérateur. Maintenant, il est évident que la population française dans son ensemble cherche aussi le prix et donc il y a un marché, même en période de non-inflation, pour des produits discount ou des produits de marque de distributeur.

Raphaëlle Duchemin : Alors justement, dans la même veine, on voit que c'est consommer moins pour moins dépenser bien sûr, mais aussi pour finalement consommer mieux. C'est-à-dire consommer local, consommer plus durable, ça aussi, c'est prégnant, ça ressort dans l'enquête. Je crois que ce sont 81% des personnes interrogées qui sont prêtes à le faire, c'est quand même énorme.

Laëtitia Moukarzel : Effectivement, si les Français étaient prêts à payer plus, ils le feraient en valorisant les critères de traçabilité, de durabilité, de local. Ce sont des critères auxquels les Français sont attachés. Il ne faut quand même pas oublier qu'on est dans un contexte d'inflation et ça c'est toujours à prendre en compte. Mais aujourd'hui le prix reste quand même un des premiers facteurs dans le parcours d'achat des clients.

Raphaëlle Duchemin : Ça veut dire que l'intention est là, mais les prix et la hausse des prix freinent un peu l'intention.

Jean Pujol : Oui totalement. Le durable et je pense qu'on pourra y revenir, c'est une tendance de fond qui existait avant la crise qu'on connaît là et qui continue à subsister. On voit que les gens, comme l'a dit Laëtitia, plébiscitent les produits qui sont durables, locaux, sans souffrance animale et que potentiellement, si leur pouvoir d'achat le permettait, ils iraient plus dessus. L'ensemble des acteurs, que ce soient les distributeurs mais aussi les fabricants, se positionnent dessus, poussés par la demande consommateur. Mais également par le contexte politico-réglementaire qui va vers plus de durable, vers une transition climatique et donc globalement vers des produits moins carbonés et plus durables.

Raphaëlle Duchemin : Alors se pose aussi, et vous l'avez prise en compte dans votre étude, la question des pénuries, des ruptures de stock qui modifient aussi de manière assez importante, le comportement et les intentions d'achat. Et ça, c'est quelque chose de nouveau, peut-être dû aux contextes qui viennent s'additionner ?

Laëtitia Moukarzel : Tout à fait, il y a pas mal de facteurs externes qui expliquent aujourd'hui que le contexte de rupture est quelque chose qui est vraiment ce avec quoi les consommateurs composent de manière assez durable. Ce n'est plus quelque chose qui est ponctuel, ça fait quelques mois que ça dure. Et ce qui est assez intéressant, c'est que les Français l'ont vraiment noté. C'est-à-dire que quand on leur demande quel a été le facteur le plus déplaisant dans leur parcours d'achat, le premier est la hausse des prix. Mais le deuxième c'est le contexte de rupture, donc c'est quelque chose qui est clairement installé.

Jean Pujol : Oui et c'est quelque chose qui est peut-être là pour durer au moins aussi longtemps que l'inflation. Puisque vous l'avez dit, c'est multifactoriel et un des facteurs au-delà du réchauffement climatique qui entraînent les sécheresses, les mauvaises récoltes, au-delà de la guerre en Ukraine, c'est aussi le contexte d'inflation qui fait que les négociations entre distributeurs et fabricants sont très tendues. Et qui fait que, parfois, d'un commun désaccord, il y a des produits qui ne se retrouvent plus en rayon, comme le cas des eaux minérales à l'automne dernier. Donc cette inflation joue aussi en plus sur la rupture. Et la rupture, fin d'année dernière, elle était 30 à 40% supérieure à ce qu'elle était en 2021. Ce qui fait qu’elle représente vraiment des trous béants dans les rayons et elle représente un manque à gagner important aussi pour les distributeurs, qui se chiffrent en plusieurs milliards d'euros sur l'année.

Raphaëlle Duchemin : Alors, on sait maintenant ce que le consommateur achète, ce qu'il laisse aussi dans les rayons pour cause de budget serré et comment il prend ses précautions pour ne pas trop trinquer à cause de l'inflation. Mais les jeunes et les seniors ont-ils les mêmes comportements ? Vont-ils aux mêmes endroits, continuent-ils comme pendant le COVID, à commander sur Internet ou au contraire, ont-ils choisi de pousser à nouveau la porte des magasins ? Là aussi, vous allez voir que tout est une question de génération. En France, c'est vrai qu'on a une tradition très vivace du petit commerce. On aurait pu penser, peut-être que le Covid-19 nous avait de manière forcée, contraints à prendre de nouvelles habitudes. Ça n'est pas vraiment le cas, 8 Français sur 10 ont repris le chemin des magasins. 

Laëtitia Moukarzel : Les Français sont vraiment attachés au magasin et ce qui est vraiment témoin de cet attachement, c'est quand on regarde tout simplement là où les Français achètent. La proportion des Français qui achètent en magasin ou la proportion des Français qui achètent en ligne n'a pas vraiment bougé depuis quelques années. Si on oublie la période Covid-19, qui a structurellement chamboulé cette répartition, il y a à peu près 80% de Français qui achètent régulièrement en magasin et qui s'y rendent.

Raphaëlle Duchemin : Et on est revenu à des niveaux équivalents à 2016.

Laëtitia Moukarzel : Exactement.

Raphaëlle Duchemin : Pourquoi ? Pourquoi est-ce qu'on est attaché à ce petit commerce, est-ce qu’on a un début d'explication ? Est-ce que c'est sociétal, est-ce que c'est très franco-français ?

Jean Pujol : Non, ce n'est pas franco-français. Alors bien sûr, l'étude montre qu'il y a des différences, notamment si on regarde ce qui se passe en Chine, où ils sont très digitalisés. Mais globalement en Europe, et principalement aussi dans les courses du quotidien, les gens sont attachés à leur petit commerce ou grande surface, pour des raisons de praticité, pour des raisons de prix. Et pour tout un tas d’autres raisons qui font qu’aujourd’hui le digital ne représente que, selon les types de produits, entre 5 et 20% des achats qui sont réalisés.

Raphaëlle Duchemin : Alors, l'attachement au commerce de proximité est réel, mais effectivement on a des tendances qui se dégagent en fonction des tranches d'âge. A-t-on des explications à fournir ? 

Laëtitia Moukarzel : Alors effectivement, l'attachement au magasin est encore plus fort quand on regarde la catégorie d'âge des plus seniors. Néanmoins, tous les Français, qu'ils soient seniors ou pas, s'accordent sur le fait que le magasin est vraiment primordial dans l'expérience d'achat. Les Français cherchent deux choses : la simplicité et la fluidité. Néanmoins, la catégorie des consommateurs les plus jeunes va avoir tendance à y chercher plus d'expériences digitales, plutôt que les seniors qui cherchent des conseils de vente plus poussés en magasin.

Raphaëlle Duchemin : Ça veut dire que le digital pur, ce n'est pas encore dans les mœurs en France ?

Jean Pujol : Disons que le digital aujourd'hui est présent dans la poche de tout le monde via le smartphone maintenant. Aujourd'hui, les parcours d'achat, quelles que soient les générations, mais notamment les plus jeunes, sont hybridés. C'est-à-dire qu'en général, il y a très peu de parcours d'achat qui sont purement en point de vente ou purement sur le smartphone ou sur l'ordinateur.

Raphaëlle Duchemin : On préfère le mix, le phygital notamment ?

Jean Pujol : Oui, c’est-à-dire que dans les 3/4 des cas, un parcours va commencer en ligne en regardant, recherchant des produits, en comparant, en regardant les avis sur les réseaux sociaux ; et dans la majorité des cas, il va se concrétiser dans le point de vente. A l'inverse, dans le point de vente il y a des expériences où l’on peut aussi compléter nos achats faits dans le point de vente avec des achats en ligne pour être livré à la maison.

Raphaëlle Duchemin : On voit qu'il y a le Click and Collect qui se développe dans certaines tranches d'âge. On a finalement, à un moment donné de l'expérience client, besoin de ce rapport humain. C'est ce qui ressort aussi ?

Laëtitia Moukarzel : Oui effectivement. Quand on demande aux Français ce qu'ils souhaitent améliorer en magasin, le premier élément qui ressort, c'est qu’ils souhaitent avoir une force de vente attentionnée. Ils veulent du service et ça, c'est quelque chose auquel les Français sont attachés. C'est particulièrement intéressant dans le contexte actuel car les distributeurs ont beaucoup de mal à recruter en magasin. On a une guerre des talents assez forte à ce sujet et donc le message est clair, les Français souhaitent qu'il y ait du personnel en magasin. Cet investissement est donc nécessaire.

Raphaëlle Duchemin : Ça veut dire que dans le magasin, plus que le produit, on vient aussi parce qu'il y a le conseil parce qu'il y a cette fameuse expérience client ?

Jean Pujol : Les clients, on le voit au travers de l'étude, recherchent de l'autonomie en magasin. Ils veulent pouvoir encaisser leurs produits tout seuls, ils veulent pouvoir se débrouiller un peu tout seuls. Mais, plus sur certaines catégories de produits que d'autres, et dans certains contextes, ils ont besoin de conseils. Ils aiment qu’il y ait une présence humaine pour leur amener ça et c'est vraiment un sujet sur lequel il y a une forte attente. C’est donc un des axes d'amélioration majeurs que les Français voient. C'est cette force de vente présente, attentionnée et qualifiée qui sait répondre à leurs besoins.

Raphaëlle Duchemin : Et ça diverge aussi en fonction de la tranche d'âge, on n'a pas les mêmes attentes finalement d'une génération à l'autre parce qu'on n'a pas les mêmes usages.

Laëtitia Moukarzel : Tout à fait, comme je vous le disais, la génération plus jeune va avoir des attentes un peu plus digitalisées : simplicité, fluidité et expérience digitale. Là où les plus seniors vont être attachés à cette force de vente et au service de Click and Collect qui aujourd'hui est assez commun finalement, pour la majorité des Français. C'est en cela que se dénotent ces deux comportements, c’est deux parcours d'achat.

Raphaëlle Duchemin : En revanche, il y a des peurs encore. Je pense évidemment au métaverse, c'est assez peu utilisé chez nous, ça l'est beaucoup plus en Chine par exemple. Mais ça influe de plus en plus sur le choix des clients, sur le choix de ceux qui utilisent. Pourquoi est-ce qu'on a du mal à franchir le pas ? 

Jean Pujol : Alors spécifiquement sur le métaverse, c'est vrai que c'est un concept qui a émergé il y a peu de temps, et qui je pense, est encore un peu flou pour les consommateurs. Disons que les contours en sont un peu vagues. Il est vrai que les années 2021-2022 ont été une période d'expérimentation pour les consommateurs comme pour les marques ou les enseignes. Seule une minorité a expérimenté le metaverse. Et pour cette minorité, le metaverse a eu un vrai impact sur le passage à l'acte. L’avenir reste à construire parce qu'on le voit aujourd'hui, il y a des interrogations, y compris de grands acteurs qui promeuvent ces environnements virtuels. Aujourd'hui, je pense que cette notion reste encore peu connue du grand public a fortiori sur son impact et son intérêt sur l'achat en lui-même.

Raphaëlle Duchemin : Autre sujet qui semble, vous allez me dire si c'est le cas, poser problème aux clients que nous sommes, c'est la fameuse récupération des données. Là aussi on a une crainte de savoir comment le magasin va utiliser les renseignements qu'il a sur nous. 90% des Français refusent catégoriquement ce partage d'informations.

Laëtitia Moukarzel : Il y a une prudence par rapport au partage des données. Je pense qu'on y est tous sensibilisés de près ou de loin. Et effectivement les Français, avec la majorité des acteurs avec lesquels ils composent, sont plutôt frileux. La majorité des gens concernés vont agir, ils ne sont néanmoins pas radicaux. Ils vont limiter le partage de leurs données au strict minimum pour pouvoir interagir avec la marque.

Jean Pujol : Et on voit, d'après l'étude, que ça concerne l'ensemble des marques ou des enseignes. Si on prend l’exemple des grands réseaux sociaux, l'exploitation des données qu'ils font n’est pas toujours conforme à ce qu'on peut espérer en France. Mais pour nos marques et nos enseignes, il y a plus d'une majorité des consommateurs qui disent faire attention et donc ça, ça impacte forcément. La donnée aujourd'hui, c'est de l'or numérique pour les enseignes et les marques, pour mieux connaître les clients, pour mieux les contacter et donc sans cette donnée-là, avec la baisse des canaux papier, ça va devenir peut-être plus compliqué pour entretenir une relation et faire venir les gens au point de vente. Donc ça, ça pose question aux acteurs, oui.

Raphaëlle Duchemin : Il y a quelque chose qui n'apparaît pas dans l'étude cette fois-ci, mais qui était très prégnant lors de la précédente édition, c'est cette notion de recyclable, de tout ce qui est revalorisé, de tout ce qui est réemployé. Est-ce qu’avec l'inflation justement et cette envie de proximité des Français, on retrouve ça de manière durable dans l'acte de consommation ?

Laëtitia Moukarzel : Je pense que c'est quelque chose que les Français n'ont tout de même pas oublié puisqu’ils ont clairement dit que s'ils étaient prêts à payer plus, ils le feraient, pour des produits qui répondent à des critères de traçabilité, de local, plutôt que par exemple, pour des produits personnalisés qui, il y a quelques années, avaient vraiment le vent en poupe. Néanmoins le prix reste aujourd’hui une préoccupation relativement forte. C'est la première clé de lecture que va avoir le consommateur Français. Néanmoins, ces critères ne sont pour autant pas délaissés mais c'est quelque chose qui s'inscrit plus à long terme.

Jean Pujol : On peut voir aussi que l'inflation pourrait avoir un effet bénéfique pour tout ce qui est économie circulaire. Effectivement, que ce soit la seconde main, l'occasion, la location, la réparation, on garde le produit plus longtemps au lieu d'en racheter un nouveau. Donc ça peut aussi avoir un effet bénéfique et ça va dans le sens du développement durable. 

Raphaëlle Duchemin : La boussole est-elle réglée sur de nouveaux indicateurs ? Nous le saurons peut-être lorsque nous reprendrons très bientôt le pouls des ménages pour établir si les tendances deviennent de réels indicateurs. Une chose est certaine, Bercy veut croire que l'inflation baissera à l'été 2023 car, comme les ménages, le gouvernement a lui aussi les yeux rivés sur la courbe des prix. 

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