L’un des premiers effets de l’IA est la remise en question des modèles hiérarchiques classiques. Les organisations passent de structures en silos à des équipes plus horizontales, autonomes et pluridisciplinaires. Ces équipes associent agents humains et agents virtuels, capables de gérer un large portefeuille de clients avec une efficacité renforcée.
Les centres de contact deviennent de véritables centres d’expérience client, où l’IA prend en charge les interactions simples (via chatbots, voicebots, etc.), tandis que les conseillers humains se concentrent sur les cas complexes ou sensibles. Cette cohabitation homme-machine impose une nouvelle organisation du travail, avec une répartition dynamique des tâches selon leur complexité.
Autre évolution marquante : l’extension de la disponibilité du service client. Grâce à l’IA, les entreprises peuvent offrir une couverture 24/7 sur tous les canaux, sans accroître leurs effectifs. Cela repositionne les missions humaines autour de l’expertise, du pilotage et de la supervision des systèmes IA.
Contrairement aux idées reçues, l’IA ne remplace pas les conseillers. Elle transforme leur mission. Les agents deviennent superviseurs d’IA, responsables de la qualité des réponses générées, de l’ajustement des paramètres et de l’intervention en cas d’escalade.
Cette évolution exige une montée en compétences. Les conseillers doivent apprendre à formuler des requêtes efficaces (prompting), à interpréter les analyses de l’IA et à associer leur jugement humain aux recommandations algorithmiques. Le jugement critique devient une compétence essentielle pour interagir avec l’IA.
De nouvelles fonctions apparaissent : curateur de connaissances, analyste qualité, tuteur d’agent virtuel… Les entreprises investissent dans des programmes de formation continue pour accompagner cette transition. L’IA devient ainsi un levier de valorisation des compétences, en orientant les humains vers plus d’expertise et de polyvalence.
Enchaîner des interactions complexes, émotionnellement chargées, ou superviser les suggestions d’une IA demande une forte mobilisation mentale. À terme, cette sollicitation permanente peut entraîner une baisse de concentration, des erreurs, de l’irritabilité et un sentiment d’épuisement. Sans dispositifs adaptés pour équilibrer les efforts, la fatigue cognitive devient un risque majeur pour la santé mentale des conseillers.
Mais l’IA peut aussi soutenir la qualité de vie au travail lorsqu’elle est intégrée intelligemment. Certaines organisations l’utilisent déjà pour détecter les signes de fatigue en temps réel, via l’analyse du ton de la voix, du rythme de parole ou de la baisse de performance. Ces signaux permettent aux managers d’intervenir rapidement, en proposant des pauses ou des ajustements de planning.
L’IA allège aussi les tâches post-interaction : rédaction automatique de synthèses ou de comptes rendus, enrichissement des bases de connaissance. Enfin, en impliquant les conseillers dans la conception des assistants virtuels, les entreprises s’assurent que l’outil est perçu comme un soutien plutôt qu’une contrainte.
L’IA générative et agentique automatise de nombreux processus métier. Elle comprend une demande client, consulte une base de connaissances et génère une réponse personnalisée en langage naturel. L’IA agentique va plus loin : elle déclenche des actions concrètes (remboursement, mise à jour de dossier, etc.) sans intervention humaine.
Cette automatisation réduit les temps de traitement, améliore le taux de résolution au premier contact et fluidifie les parcours clients. Les interactions deviennent plus proactives : l’IA peut anticiper les besoins, envoyer des notifications ou proposer des solutions avant même que le client ne se manifeste.
Les processus internes évoluent aussi. Le contrôle qualité peut être automatisé grâce à des analyseurs sémantiques capables d’évaluer 100 % des interactions. L’IA génère également des fiches de connaissances ou des synthèses après chaque cas traité, enrichissant en continu la base de savoir de l’entreprise.
L’intégration de l’IA dans la relation client nécessite une gouvernance solide. Les entreprises mettent en place des comités de pilotage, des centres d’excellence IA et des politiques de Responsible AI. De nouveaux indicateurs suivent l’activité des agents virtuels : taux de résolution, taux d’erreur, temps moyen d’intervention humaine…
Les budgets alloués à l’IA augmentent fortement. Mais cette industrialisation implique aussi de moderniser les systèmes d’information, de consolider les bases de données et de renforcer la gouvernance des données.
La conformité réglementaire devient un sujet majeur. Les entreprises doivent assurer la transparence des interactions, prévenir les biais et protéger les données sensibles. Les contrats d’externalisation incluent désormais des clauses spécifiques sur la performance des agents IA et la répartition des responsabilités.
La transformation des centres de relation client par l’IA n’est plus théorique : elle est déjà en cours dans des organisations comme BNP Paribas et Lyft.
Chez BNP Paribas, la plateforme « Contact » traite des millions de mails et d’appels entrants chaque année. Elle analyse le langage naturel et automatise les réponses. Le serveur analyse déjà 90 % des appels téléphoniques, et la banque vise 80 % de demandes résolues dès le premier appel. Au-delà de la technologie, toute l’organisation a évolué : les équipes ont été réorganisées autour de nouvelles compétences mêlant IT, data et relation client.
Chez Lyft, l’intégration de l’IA Claude (Anthropic) a transformé le service client. L’IA prend désormais en charge la majorité des demandes simples et standardisées, réduisant les délais de résolution de près de 87 %. Les conseillers se concentrent sur les cas complexes, sensibles ou à forte valeur ajoutée (fraude, litiges, désactivations). De nouvelles missions apparaissent : supervision de l’IA, suivi de sa performance, ajustement des réponses. L’organisation passe ainsi d’un modèle « agent-first » à un modèle hybride « IA + expert humain », où la collaboration homme–machine devient centrale pour offrir rapidité et qualité.
L’IA représente une opportunité majeure pour repositionner les conseillers sur la valeur ajoutée, tout en répondant aux attentes croissantes des clients et en améliorant le ROI. Bien intégrée, elle transforme les centres de relation client (CRC) en moteurs de performance et d’innovation.
Cette intégration suppose une montée en compétences significative des conseillers pour maîtriser et utiliser efficacement les outils. Les formations jouent un rôle central pour faire de l’IA un soutien, et pas une contrainte.
La révolution IA est en marche, et tout se joue maintenant. Serez-vous de la partie ?
Chez PwC, nous accompagnons nos clients dans la mise en place de stratégies IA adaptées à leurs enjeux, comme la transformation de l’organisation relation client, l’optimisation des coûts ou l’amélioration de la satisfaction client. Ensemble, définissons une stratégie IA adaptée et bâtissons une feuille de route sur mesure pour développer les capacités de votre entreprise qui feront la différence.
Nicolas Vincent
Associé, Responsable digital et AI customer transformation, PwC France et Maghreb