La responsabilité, moteur discret de la transition durable

Forêt vu du ciel
  • 17 sept. 2025

Il est devenu courant de parler de durabilité comme d’un horizon à atteindre, une sorte de label universel que l’on appose sur les entreprises comme on tamponne un passeport. Pourtant, cette vision est trompeuse. Car aucune organisation, dans la complexité de ses chaînes de valeur, ne peut prétendre être durable en tout point. Ce qui est possible — et nécessaire — c’est d’être responsable. Non pas dans les slogans, mais dans les choix. Dans chaque décision, chaque arbitrage, chaque trajectoire.

Mais cette responsabilité se heurte à une tension fondamentale : celle entre les ambitions de long terme et les exigences de performance immédiate. Les objectifs liés à la transition écologique, à la régénération des écosystèmes, à la justice sociale, s’inscrivent dans des temporalités longues. Or, les marchés, les actionnaires, les tableaux de bord financiers, eux, vivent dans le court terme. Cette tension est réelle, structurante, et elle doit être abordée sans détour. Il ne s’agit pas de la nier, mais de la nommer, de la discuter, de la gérer.

Pour cela, il faut de la clarté. Clarté sur les intentions : que veut-on transformer, et pourquoi ? Clarté sur les moyens : comment allons-nous procéder, avec quelles ressources, quelles priorités ? Clarté sur les conséquences : quels seront les impacts financiers, humains, opérationnels ? Et surtout, clarté sur les tensions elles-mêmes — car elles ne disparaîtront pas. Elles doivent être intégrées au dialogue stratégique, non pas comme des obstacles, mais comme des réalités à piloter.

Dans ce contexte, les entreprises ont un rôle politique à jouer. Elles doivent soutenir des politiques publiques qui garantissent des règles du jeu équitables. Car sans terrain de jeu nivelé, les efforts de transformation risquent d’être pénalisés. La responsabilité ne peut pas être un luxe réservé à ceux qui peuvent se le permettre. Elle doit devenir une norme, soutenue par des cadres réglementaires cohérents et ambitieux. 

Et pourtant, au cœur de ces défis, des opportunités majeures émergent. Comprendre les risques systémiques liés au climat, à la biodiversité, aux ressources, ce n’est pas seulement anticiper des menaces — c’est se préparer à mieux performer. C’est se donner les moyens de résister, d’innover, de créer, de se réinventer. Car le changement, par son ampleur, ouvre des brèches. Il appelle de nouveaux produits, de nouveaux services, de nouveaux marchés. Il redéfinit les besoins, les usages, les attentes.

Mais pour que cette transformation soit possible, il faut embarquer les investisseurs. Leur rôle est central. Le statu quo n’est plus une option. Le monde change, et avec lui, les arbitrages économiques. Ce qui semblait rentable hier pourrait ne plus l’être demain. L’investissement responsable devient non seulement une exigence éthique, mais une nécessité stratégique.

L’avenir ne se joue pas en 2050. Il se joue maintenant. Les effets du changement climatique sont déjà là, et ils vont s’intensifier. Certaines conséquences graves arriveront plus tôt que prévu. Et face à cette réalité, la tolérance envers les entreprises perçues comme faisant partie du problème va s’amenuiser — de la part des clients, des employés, des gouvernements. La pression va s’accroître, et avec elle, l’urgence d’agir.

La responsabilité n’est pas une posture. C’est une stratégie. Une manière de penser l’entreprise dans son époque, avec lucidité, courage et ambition. 

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Sylvain Lambert

Sylvain Lambert

Associé Développement durable, PwC France et Maghreb

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