Un premier changement de taille concerne le compte de résultat qui est davantage standardisé avec trois catégories, dont deux catégories « investissement » et « financement » strictement définies et une catégorie opérationnelle dite « résiduelle ». Ce changement nécessite une analyse approfondie ligne à ligne du plan de comptes pour reclasser les éléments dans les catégories appropriées. Certains éléments devront également être décomposés entre les trois catégories selon leur nature ou leur sous-jacent. Il est à noter que les sociétés qui ont des activités de financement ou d’investissement font l’objet de dispositions spécifiques prévues par IFRS 18.
La catégorie opérationnelle inclut, en plus des produits et charges liés aux activités principales, ceux qui ne sont pas classés dans les autres catégories. Elle peut donc être difficile à comprendre et constituer un enjeu important de communication surtout lorsqu’il s’agit d’éléments volatiles ou non récurrents. Par ailleurs, il existe des enjeux propres à la présentation des charges opérationnelles, notamment les postes à présenter et le niveau d’agrégation. Cette présentation est à apprécier en fonction du suivi interne de la performance, des pratiques sectorielles et des informations disponibles. Enfin, une attention particulière est à porter aux lignes « autres produits et charges opérationnels » couramment utilisées qui, en pratique, peuvent inclure des éléments assez variés et/ou un mix de nature et fonction, et qui pourront devoir être désagrégées ou agrégées différemment.
IFRS 18 prévoit également de nouveaux sous-totaux normalisés à la face du compte de résultat. Certains sont obligatoires (dont le résultat opérationnel), d’autres prévus par IFRS 18 mais optionnels, d’autres encore dits additionnels, c’est-à-dire librement définis sous réserve qu’ils respectent le nouveau format de compte de résultat. Avec ces nouvelles règles, certains sous-totaux actuels sont à repenser et font l’objet de vives discussions. Il y a par exemple des interrogations fortes sur la possibilité de continuer à présenter un « résultat opérationnel courant » au sein du compte de résultat. Ou encore, la disparition du coût de la dette nette à la face du compte de résultat amène à réfléchir sur l’utilisation de cet agrégat : indicateur de performance dans la communication financière, simple information dans les annexes ou abandon de son utilisation ?
Plus largement, ce sont tous les éléments présentés dans les différents états primaires et dans les notes annexes qui doivent être revus pour s’assurer de leur pertinence, de leur niveau d’agrégation et/ou désagrégation et du caractère suffisamment explicite de leur libellé. Il s’agit d’un exercice complexe en pratique et qui requiert du jugement.
Un autre changement majeur concerne les indicateurs alternatifs de performance P&L utilisés dans la communication financière, dits MPM (Management-defined Performance Measures). Perçus par les lecteurs des états financiers comme des indicateurs clés mais souvent insuffisamment définis, les MPM font désormais l’objet d’une note annexe dédiée dans les états financiers et seront audités. Leur (re)définition à la lumière d’IFRS 18 n’est pas simple. Elle mobilise différentes parties prenantes (comme les relations investisseurs et le contrôle de gestion), tient compte des sous-totaux P&L pré et post IFRS 18, ainsi que des indicateurs internes de pilotage de la performance qui répondent parfois à des objectifs différents. En outre, l’effort de transparence demandé dans la note annexe est important et constitue un véritable enjeu : justification, documentation et réconciliation fine au sous-total P&L IFRS 18 le plus proche.
Dernier changement important à noter nécessitant de repenser la construction du tableau de flux de trésorerie. Le point de départ de ce tableau est désormais le résultat opérationnel pour la méthode indirecte.
Vous l’aurez compris, en touchant aux indicateurs de performance et à la communication financière, IFRS 18 touche un sujet sensible que l’on voit discuté au plus haut niveau et qui conduira à des impacts dans le plan comptable groupe, le mapping, le format des reportings et les systèmes IT. La mise en œuvre d’IFRS 18 est un vrai projet avec de nombreuses ramifications en dehors des états financiers qu’il ne faut pas sous-estimer et qu’il faut traiter en incluant toutes les parties prenantes concernées.